Cher Aviron, tu vas me manquer

Cher Aviron,

Une fois n’est pas coutume, c’est à toi que je souhaite aujourd’hui m’adresser. Après de nombreuses tentatives pour écrire cet article, des heures passées à effacer ou recommencer, c’est en signant la fin du précédent essai d’un « Cher Aviron, tu vas me manquer » que je me suis rendu compte que je devais laisser parler mon cœur et t’écrire en personne.
Oui tu vas me manquer mon cher sport. Alors bien sûr, on se reverra régulièrement car je compte bien continuer à profiter de ce que tu as de mieux à me donner mais je pense qu’il est temps pour moi de remiser ma combinaison internationale et de te faire mes adieux les plus entraînés.


Une chose est sûre, tu auras été plein de surprises. Si tu m’avais dit en Septembre 1999 que 18 ans plus tard je serais encore là avec toi, je me serais certainement ri de ton arrogante certitude. Mais ta force réside dans la passion et l’amour que tu donnes à tes fidèles. Sans les entraîneurs de mes débuts et cette passion transmise, rien ne serait arrivé. Tu as même réussi à convertir une grande partie de ma famille qui sans relâche a été présente à mes côtés.
Nous en avons parcouru du chemin ensemble, mon cher sport, depuis les bords de la Maine et son château paisible jusque sur les lacs canadiens. Certes il y a les voyages et les médailles mais il faut dire que tu as le don d’aimer la voltige et le rodéo. Que de hauts et de bas ! Tu auras réussi, dans ces montagnes russes, à m’ouvrir des perspectives sur moi-même et à me donner cette chance unique de me découvrir. Tes valeurs d’effort, d’intégrité, de travail, d’équipe et de ténacité sont les raisons des victoires mais elles se révèlent seulement au grand jour dans la difficulté. Si tu m’as laissé des cicatrices sur le corps, tu auras su marquer au fer rouge ma personnalité forgée par les dizaines de milliers de kilomètres parcourus mais aussi par les rencontres et les amitiés éternelles. Quand je regarde ma fille de 10 mois, je te remercie de m’avoir fait croiser le sillage de Katie en 2003.
N’oublie tout de même pas que si tu vas me manquer, certains de tes défauts, eux, ne se feront pas désirer de sitôt. Finis les pipis dans les éprouvettes pour les contrôles antidopage. Finis Big Brother et la localisation quotidienne obligatoire. Finies les sorties sous la pluie battante par 2°C. J’essaye de te trouver plus de défauts mais je n’y arrive pas. Tu m’auras fait traverser un océan à la rame et je ne t’en veux pas. Même si je sais que l’avion était aussi une possibilité pour visiter la Martinique !
A mes côtés, ce sont des centaines de personnes qui de près ou de loin ont été impliquées par ton fait. Amis, famille, collègues, partenaires, fans, ... . Tu as su réunir autour de toi et j’en suis infiniment reconnaissant.
Tu m’as tant donné que j’espère pouvoir te le rendre au centuple. Tu m’as donné la confiance d’avancer quoiqu’il arrive car comme tout bon rameur que je suis tant que la ligne n’est pas franchie, je ne m’arrête pas.
Le bip d’arrivée a retenti. La course est finie. Comme toute course, il y a eu des bons coups et des moins bons. Des coups que j’aurais pu mieux faire et des coups quasi parfaits. Comme toute course, cela est passé vite et j’ai du mal reprendre mon souffle. Mais je sais aujourd’hui que cette course fut la meilleure. Pas de regret. J’ai tout donné. Je me suis battu. J’ai le sourire et j’en pleure tellement c’est bon.
Pas le temps de récupérer. Il faut retourner au départ et s’aligner pour cette nouvelle course qui débute. Le stress positif que j’aime tant se fait sentir. Je me sens prêt. Il faut dire que tu m’as tellement appris que je ne peux envisager cette prochaine course qu’avec confiance. Je regarde par-dessus mon épaule la ligne d’arrivée est loin. Je ne la distingue même pas. Je dois me focaliser sur mon premier coup. Tu vois, je sais quoi faire et tu ne seras jamais bien loin.
Merci à toi mon cher Aviron.
Et bien sûr, l’aventure continue...

Bien à toi

Julien